Depuis
1990, la presse béninoise a fait d’énormes progrès sur le plan de la liberté.
La
première étape a été l’avènement d’une presse privée suite à la libération de
l’espace médiatique en 1997 et ce, après des années de monopole d’Etat.
Un
autre acquis est la possibilité que les journalistes ont de faire de leurs
médias de vrais organes d’information, plutôt que des marionnettes au service d’un
pouvoir avide de propagande.
Malheureusement
certains journalistes sortent de notre devoir premier.
Combien
sont-ils ceux qui contribuent réellement à l’enracinement de la démocratie
chèrement acquise depuis l’historique conférence de février 90 ?
Le
journalisme est certes un métier d’écriture, mais pas comme n’importe quel
métier d’écriture.
Dans
‘’écrire’’ ici, je lis ‘’crier’’. Le journaliste c’est donc
celui qui crie pour alerter l’opinion
publique, il crie pour éveiller les consciences, il crie pour sensibiliser.
La
facilité est l’une des qualités du journaliste, c’est un instant très délicat,
une attitude évidemment plus gênante qui peut l’amener à commettre des bévues.
Déjà
au cours des élections présidentielles de mars 2001 et à la veille des
municipales et communales de décembre 2002 et prenant le pool des médias à la
veille des présidentielles de mars 2006, l’ODEM (l’Observatoire de la
Déontologie et de l’Ethique dans les Médias) a relevé dans son rapport de suivi
déontologique ce qui suit :
« L’article 6 a été violé 58 fois en deux
mois dans les organes de presse observés ; l’article 2 violé 27 fois ; l’article 11 violé 14 fois, etc. Rapport de suivi déontologique de
février 2006. »
Les
articles : 6 relatifs à l’interdiction
de la diffamation, de l’injure et de la calomnie, 2 relatifs à l’impératif de vérification des informations et 11 à propos des titres sensationnels
caracolent toujours en tête des violations massives dans nos médias.
Des
dispositions du code de déontologie indissociables du socle du
professionnalisme.
Toujours
selon le même rapport, déjà de mars 1999 à avril 2003, l’état des violations a
montré que l’article 6 a été violé
70 fois, l’article 2 violé 65 fois
puis l’article 11 violé 25 fois.
Des
dispositions qui malheureusement continuent d’être violées par nos médias
aujourd’hui.
Que
vaut un journaliste constamment désigné par ses pairs comme quelqu’un qui ne
connaît pas le métier ?
Cela
mérite réflexion et doit être le déclic pour une prise de conscience
professionnelle.
La
course à l’audience et le populisme ne sauraient primer sur le respect des
règles régissant notre métier.
Le
mythe du « chevalier blanc » dénonçant tel ou tel scandale,
confrontant les puissances pour faire éclater la vérité s’oppose à la réalité
du métier.
Divers
sondages montrent également que les journalistes ont perdu de leur crédibilité
et ceci est d’autant plus vrai au niveau des journalistes de l’audiovisuel
(Radio et Télévision) et spécialement tant de ceux de la télévision que de ceux
de la presse écrite et cela est due à la force de l’image ; cette image
qui fait trace, qui accroche et qui émeut.
Quand
on parle de manquement à la déontologie, on pense immédiatement à la complicité
entre les stars de la profession et les hommes politiques, les hommes
d’affaire.
La
principale cause du manquement à la déontologie n’est souvent pas la corruption, qui n’est d’ailleurs pas
plus importante dans la presse que dans les autres métiers ; mais le
manque de temps à consacrer pour chercher et rassembler les preuves.
La
communication est parfois dommageable à l’information. Lorsque le gouvernement
lui- même possède et contrôle des médias qui n’ont pas d’autre choix que de faire
la part belle au chef de l’Etat, la presse au lieu d’être la sentinelle de la
démocratie devient un instrument de propagande pour nos gouvernants.
La
liberté de la presse ne s’octroie pas
d’un coup, elle se conquiert peu à peu.
Une
liberté qui ne s’accompagne pas de responsabilité est un danger pour la
démocratie
Les
instances d’autorégulation jouent tant bien que mal leur rôle de veille car
elles d’auto-saisissent de certains dossiers de dérive de la presse parfois.
C’est ce qu’a fait l’ODEM (l’Observatoire de la Déontologie et de l’Ethique
dans les Médias) qui avait condamné, le quotidien « l’AURORE » pour
sa parution du 09 novembre 2005 : les faits : sous la plume du
confrère Arnauld Djossouvi, le quotidien l’Aurore titrait à la page 1 et en
page 4, «budget de la HAAC pour 2006. Des prévisions à vous couper le
souffle ». Dans l’article, on peut relever les termes tels :
« La HAAC budgétivore, les conseillers n’ont pas hésité à montrer leur
appétit glouton. »
Appréciation
L’ODEM
constate que le quotidien l’AURORE et Arnaud Djossouvi se sont redus coupables
de calomnie et d’injures en écrivant : « la HAAC budgétivore »,
« les conseillers n’ont pas hésité à montrer leur appétit glouton ».
Ce faisant, ils ont violé l’article 6 du code de déontologie. Cet article
interdit l’injure.
Par
conséquent, l’ODEM les condamne pour violation dudit article.
Outre
l’AURORE, on peut citer aussi, LE BENINOIS pour sa publication du 10 novembre
2005, L’ÉVÉNEMENT DU JOUR du 07 décembre 2005, FRATERNITE du 09 novembre 2006, FRATERNITÉ du 18 novembre 2005, L’INDÉPENDANT du 06 octobre 2005 etc. etc.
Toutes
les dérives de certains confrères et de certains médias, n’empêchent pas
d’autres confrères de garder haut l’étendard de notre métier si non :
Que
serait le scandale du sang contaminé si la journaliste Anne- Marie Casteret
n’avait pas existé ?
Maurice
Papou serait –il démasqué sans les journalistes de Canard Enchaîné ?
Le
journaliste n’écrit pas pour être riche, pour s’enrichir il existe bien
d’autres métiers.
Les
pays où la presse n’est pas la bienvenue, sont des pays où le droit de l’homme
est bafoué.
Lorsque
des journalistes, libres sur papier sont menacés, agressés ou condamnés par une
justice fort dépendante des pouvoirs politiques, nous devons lutter pour que
cela cesse et ne se répète plus jamais.
Le
journaliste est un humain et rien de tout ce qui est humain ne lui est étranger.
Chers
confrères, le code de l’information et de la communication voté par nos
honorables députés a été promulgué le 20 mars 2015 par le président de la
république.
Une
fois encore, nos institutions ont joué leur rôle d’éveilleur de conscience des journalistes.
Nos
institutions ne se contentent pas de sanctionner, elles participent aussi à la
professionnalisation des hommes des médias et c’est dans ce cadre que s’inscrit
la formation des 120 journalistes en multimédias que la CNMAN (Commission
Nationale de Migration de l’Analogique au Numérique) a lancé depuis le 13 avril
2015.
Pour
une période de 9 mois, le Centre d’études et des Sciences et Techniques de
l’Information (CESTI) est délocalisé à Cotonou.
L’objectif
est de former des journalistes de type nouveau. Au cours de ces 9 mois, les 120
journalistes vont se familiariser avec les textes de lois et surtout les textes
de lois régissant la corporation des hommes de plume que nous sommes.
Ils
feront également la connaissance des nouveaux médias (blogs, twitter etc.)
Chers
confrères, notre peuple assoiffé et chosifié se meurt. Nous devons donc en être
les sentinelles.
Écrivons !
Que dis- je ? Crions pour réveiller notre peuple, pour le conscientiser
d’avantage.
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